Les autorités russes continuent de réduire méthodiquement l’espace des droits et des libertés. De plus en plus, cela concerne non seulement les militants ou les médias indépendants, mais aussi les citoyens ordinaires, y compris les jeunes, souvent appelés aujourd’hui la « génération Zoom ». Les nouvelles restrictions ne prennent pas toujours la forme d’interdictions directes. Elles sont bien plus souvent présentées comme une « modernisation numérique », un « service pratique » ou une « recommandation » qui se transforme rapidement en obligation.

Un exemple récent est la pression exercée sur les étudiants et les enseignants afin de les contraindre à passer au messager « national » MAX.

Le 11 novembre, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Science a exigé que les universités passent rapidement à MAX : s’inscrire sur la plateforme, créer des canaux et des groupes de discussion pour les étudiants, et rendre compte de son utilisation. Les exigences mentionnent explicitement le suivi de l’activité des étudiants et du personnel. La date limite est stricte — le 19 décembre. Ce qui ressemble d’abord à une recommandation devient, dans la pratique, une contrainte.

Le projet de défense des droits humains « Par choix personnel » indique avoir déjà reçu des dizaines de signalements : plus de 40 provenant d’universités et de collèges, ainsi que 22 d’écoles et de jardins d’enfants. Les plaintes proviennent de 20 régions, principalement de Moscou. Le scénario est similaire partout : les menaces directes d’exclusion ou de licenciement sont rares, mais des conditions sont créées rendant impossible l’étude ou le travail sans MAX. Les emplois du temps, les examens et les annonces importantes sont transférés vers ce messager, tandis que les canaux habituels cessent de fonctionner. Dans certains établissements, des listes de personnes inscrites sont tenues, et ceux qui n’ont pas installé MAX reçoivent des rappels quotidiens.

Des inquiétudes majeures concernent également la sécurité et la protection de la vie privée. MAX dispose d’un code source fermé, l’existence d’un chiffrement de bout en bout n’est pas claire, et les modalités de stockage et de transmission des données restent opaques. Des projets d’intégration avec le portail des services publics sont évoqués, impliquant une connexion « par passeport » et la disparition de l’anonymat numérique. Dans ce contexte, l’installation obligatoire d’un messager n’apparaît plus comme une commodité, mais comme un outil de contrôle.

Les juristes rappellent que les établissements scolaires n’ont pas le droit d’imposer l’installation d’un messager comme condition d’étude ou de travail. Une telle pression constitue une violation des droits, et non une innovation.

Dans ce contexte, le projet « Par choix personnel » a lancé une pétition exigeant l’examen de tous les cas de contrainte liés à MAX et la fin des pressions sur les étudiants, les enseignants et les autres employés du secteur public.

Pour la génération Zoom, les droits numériques ne sont pas abstraits. La confidentialité, la liberté de communication et le choix des plateformes font partie intégrante de leur quotidien. C’est pourquoi ces mesures sont souvent perçues comme une intrusion dans la vie privée.

Les réactions possibles incluent :

  • une résistance discrète et des contournements ;
  • des actions juridiques et une pression publique ;
  • des protestations locales ;
  • un effet d’accumulation transformant le mécontentement en colère politique.

Les exemples internationaux montrent que les jeunes peuvent devenir une force de changement, mais seulement lorsque plusieurs facteurs convergent. En Russie, les autorités semblent miser sur l’inverse : limiter les espaces, compliquer l’auto-organisation et placer la communication sous contrôle. La réponse la plus probable aujourd’hui n’est donc pas une mobilisation de masse, mais une résistance diffuse : campagnes, boycotts, fuites d’informations, perte de confiance et radicalisation progressive des opinions.

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